Le mois de septembre est associé aux fêtes des vendanges et du vin, donnant lieu à force libations. Les dates des vendanges dépendent des régions, de l'ensoleillement et des cépages, mais la fin de la récolte s'accompagne toujours de réjouissances où la dive bouteille est à l'honneur.

Chez les membres du Petit Peuple, il semble bien que ce soit les nains qui, plus que d'autres peuples féeriques, ont pour vocation de prêter main forte, sinon aux vendanges elles-mêmes, en tout cas aux festivités qui les accompagnent, pour aider à vider les cuves et les fûts des boissons qu'elles contiennent. C'est également l'époque où les gobelins tiennent leur marché, réservé exclusivement au Petit Peuple de Féerie. Les humains qui s'y risquent, voie même qui se contentent d'en épier les activités, deviennent la proie de ces terribles lutins qui les pincent, leur tirent les cheveux et les forcent à consommer des fruits de la mort. Christina Rossetti écrivait en 1862 dans Le Marché des Gobelins :

Il ne faut pas regarder les gobelins,
Il ne faut pas acheter de leurs fruits,
Qui sait de quel sol ils ont nourri
La faim et la soif de leurs racines ?

C'est aussi le moment où les korrigans chantent leur fameuse chanson des jours de la semaine dans les landes bretonnes :

Lundi, mardi, mercredi,
Jeudi, vendredi, samedi,
Et le dimanche aussi,
Et voilà la semaine finie.

Malheureusement, ils oublient toujours les paroles pourtant simples de cette chanson, et sont prêts à donner un trésor à celui qui leur rafraîchira la mémoire. Noirs et velus, pourvus d'une grosse tête à la tignasse crépue sur laquelle poussent deux petites cornes, dotés de petits yeux noirs et brillants, parfois rouges, profondément enfoncés dans leurs orbites, les mains prolongées de griffes de chats et les pieds recouverts de corne de bouc, les korrigans sont coiffés d'un grand chapeau plat, agrémenté d'un ruban de velours. Ils ont à la ceinture une petite corne dans laquelle ils soufflent, une bourse de cuir remplie d'or, ainsi qu'un étrange sac de crins et de poils, qui se métamorphosent en rivières de pierres et en joyaux de grand prix. C'est pourquoi les korrigans veillent sur ces sacs de toile comme sur la prunelle de leurs yeux.

Texte : Edouard Brasey